Publié le 15.06.2023 à 11h52 par Arnaud Nicolas Mawel
L’opposant historique du président Paul Biya a tiré sa révérence le 12 juin 2023 des suites d’une longue maladie à l’âge de 82 ans.
Le président national et fondateur du Social democratic front (Sdf) n’est plus. Ni John Fru Ndi est décédé ce lundi 12 juin 2023 à Yaoundé, annonce le Comité exécutif national de son parti, dans une note signée du 1er vice-président national, le député Joshua Osih. Le natif de Bamenda dans la région du Nord-Ouest, le chairman lance son parti politique le 26 mai 1990 lorsque le vent du pluralisme politique souffle de nouveau au Cameroun. Il se met à la conquête du pouvoir en opposition à Paul Biya, successeur en 1982, du premier président du Cameroun indépendant, Ahmadou Ahidjo.
Il associe à son slogan politique « Power to the people », « Suffer don finish », le geste d’un poing levé vers le ciel, signe de la vitalité et de la vigueur d’un adversaire de poids au régime en place. Cette force va se matérialiser au cours de l’élection présidentielle de 1990. Le Chairman engrange alors 36% des suffrages contre 40% pour Paul Biya, le vainqueur, dont il devient dès lors, le principal opposant jusqu’en 2011.
L’opposant historique de Paul Biya
Durant ces 20 années, Ni John Fru Ndi reste avec son parti le Sdf, la deuxième force politique du Cameroun. En 1997, il boycotte la présidentielle pour dénoncer la fraude à l’élection de 1992. Après ce boycott, il est toujours derrière Paul Biya lors des élections présidentielles successives. Avec 17,40% en 2004 et 10,71% en 2011. Il va perdre cette place à l’issue de la présidentielle du 09 octobre 2018 à laquelle il n’est plus candidat en raison de la fatigue et de la maladie. Son successeur à la candidature, Joshua Osih, n’obtient que 3,36% des votes derrière Cabral Libii (6,28%), Maurice Kamto (14,23%) et Paul Biya (71,28). C’est à la veille de cette élection que le chairman montre les premiers signes de son départ à la gestion du parti. Il décide de laisser cette responsabilité à la jeune génération.
Il reste tout de même président de la formation politique qui aura marqué sa distance avec le régime jusqu’en 2009. Le 10 décembre 2010, Ni John Fru Ndi et Paul Biya se rencontrent à l’occasion de la célébration des 50 ans de l’indépendance du Cameroun à Bamenda. Ce rapprochement va se répéter en 2011 au comice agropastoral d’Ebolowa. Il va se traduira aussi par la présence de l’opposant au Palais de l’Unité lors de la réception au soir du 20 mai, fête nationale, à l’invitation du couple Paul et Chantal Biya.
John Fru Ndi pour la démocratie et la paix
Au cours de ces 33 dernières années, le chairman du Sdf a combattu les formes de résistance au processus démocratique au Cameroun. Cela a duré depuis son départ du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) parti au pouvoir jusqu’au moment où il a décidé de jouer la carte d’apaisement en passant par les villes mortes. Il a très tôt dans les années 1990 lancé le mouvement « Biya Must Go (Biya doit partir) » avec un ton virulent. En raison de cette opposition, il sera sollicité par des séparatistes anglophones pour mener le mouvement politique de la sécession dans le Nord-Ouest et le Sud-ouest. Rejetant la proposition au profit de la paix et de la réconciliation, il sera enlevé puis libéré à deux reprises.
Succession ouverte à la tête du Sdf
Il y a quelques jours, le vice-président a annoncé que le fondateur du Sdf ne sera candidat à la tête du parti lors du congrès prévu en fin juillet 2023. Voilà qu’il a effectué « le passage à la gloire éternelle » quelques jours avant. Ainsi, plus de doute, la succession est ouverte de manière naturelle.
Elle qui fait déjà bruit au sein de la formation politique depuis quelques années. Tension devenue inévitables ces derniers mois entre une vingtaine de cadres et militants dont le député Jean Michel Nintcheu et le Comité exécutif national du parti. Les premiers contestant certaines décisions du second et du président national. Ils seront exclus du parti au moment où l’alternance se prépare. Et le chairman s’en va laissant ses enfants dans cette division. « Le programme des obsèques sera communiqué dès qu’il sera établi », annonce le parti.
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